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Ween Will rock You

2 décembre 2008

Un nouveau Ween dans les bacs avant Noêl !

ween_catscradleCe n'est pas vraiment un nouvel album puisqu'il s'agit d'un live datant de 1992, mais c'est par contre un document exceptionnel qui comporte à la fois un CD live et un DVD. Qu'est-ce qu'en dit Dean d'ailleurs ? Depuis notre premier vrai concert en 1987 jusqu'à la sortie de Chocolate & Cheese en 1994, nous nous sommes produits en duo : Gene au chant et à la guitare acoustique, et moi à la guitare électrique, les parties de basse et de batterie étant pré-enregistrées sur un radiocassette. Par la suite, nous avons fait l'acquisition d'un lecteur DAT pour les bandes d'accompagnement et ça a dynamisé un peu le spectacle.

A l'époque, un concert habituel de Ween ne durait guère plus d'une heure et je peux t'assurer que, pendant ce temps-là, on enquillait 24 morceaux. On ne se permettait pas de digressions, les choses étaient vraiment différentes d'aujourd'hui. Chaque soir, c'était comme si nous étions à poil face au public, on ne pouvait pas se planquer vu que nous n'étions que deux. On parlait beaucoup entre les morceaux parce qu'on n'avait pas trop le choix, il fallait bien meubler. On a souvent été confrontés à l'hostilité du public quand nous jouions en première partie. Malgré toute la haine qui nous était adressée, je pense que nous avons réussir à convertir pas mal de spectateurs grâce à nos nerfs d'acier. Beaucoup d'amis proches prétendent que voir Ween en concert a perdu beaucoup de son intérêt quand nous sommes passés à une formule plus traditionnelle avec un batteur et un bassiste et je suis mal placé pour en juger, mais quand nous avons sorti Pure Guava, notre formule en duo n'avait plus d'intérêt pour nous.

A l'époque, nous tournions de plus en plus, et jouer les mêmes chansons tous les soirs sans la moindre marge d'improvisation était devenu chiant. Après que nous ayons commencé à sortir des disques et à tourner plus souvent en tant que duo, nous sommes devenus meilleurs, on a arrêté de se prendre la tête avec ce que les autres pouvaient penser de nous pour se concentrer sur une chose : prend notre pied. Je crois que c'est là qu'on a atteint le maximum de nos capacités.

Je ne me souviens pas particulièrement de ce concert, si ce n'est qu'on a joué au Cat's Cradle assez souvent ainsi que dans bien d'autres endroits. Public Enemy avait joué dans cette même salle quelques jours avant nous, ils avaient explosé la sono et notre ingénieur du son Kirk Miller était dégoûté. Moi, je trouvais ça super parce que Public Enemy était un de mes groupes favoris et c'était génial de passer juste après eux. Notre équipe était juste constituée de Gene, Kirk Miller, qui nous servait d'ingénieur du son et de chauffeur, et moi-même. Après que nous ayons signé avec Elektra, Paul Monahan nous a rejoint en tant que régisseur, et il est resté auprès de nous pendant de nombreuses années. Peu importe, c'est assez représentatif de ce à quoi nous ressemblions les bons soirs de ces premières tournées. 

Ca se précommande chez Chocodog, chez Schnitzel ou sur Myspace pour ceux qui ne peuvent pas attendre la mise en bac à la mi-décembre. Pour les plus insatiables, y'a même une édition limitée avec un t-shirt, et un livre de coloriages qui comprend des dessins unsuitable for children. Ca a l'air un peu con mais c'est quand même difficile d'y résister. Surtout que c'est bientôt Noël.

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17 mars 2008

La seule interview de Ween parue dans un magazine français en 2007

splash40On ne peut pas dire que la parution de La Cucaracha ait été suivie de beaucoup d'échos dans la presse française qui, depuis la parution de Quebec, semble un peu avoir laché les frères Ween au moment même où leur discographie, sortant de la trilogie pop Chocolate & Cheese -The Mollusk-White Pepper, retrouvait le goût du risque. Chronic'art est certainement l'exception qui confirme la règle, et puisque le numéro dans lequel l'article consacré aux frangins n'est plus en kiosque et que son auteur est d'accord, publions-le ici.

Artistes conceptuels, chanteurs situationnistes, meilleur groupe de rock post-moderne du monde ? Le duo Ween revient avec un vrai-faux album de fête, La Cucaracha, nous révélant encore une fois l’envers du décor du grand cirque de la pop culture. Rencontre.

Par Wilfried Paris (avec l’aide de Pacôme Thiellement)

Ween (combinaison des mots Wuss et Penis) est un groupe de rock alternatif fondé en 1984 à New Hope, Pennsylvanie, par Aaron Freeman (rebaptisé Gene Ween) et Mickey Melchiondo (Dean Ween) lorsqu’ils étaient encore lycéens. Après 23 ans de carrière, dix albums « officiels » et des milliers d’heures d’enregistrements, les deux adorateurs du Boognish (le démon grimaçant et couronné qui leur sert de logo) ont une cohorte de milliers de fans fidèles aux Etats-Unis mais ne font figure que de curiosité en France (sans doute parce que les français comprennent très mal la langue anglaise). Pourtant, Ween est un des groupes les plus importants du monde. Nous allons ici vous expliquer pourquoi.

Tout est dans Ween

D’abord, sachez que tout est dans Ween et Ween est dans tout. Un amateur de musique pop pourrait très bien n’écouter que du Ween. La particularité du duo est de pouvoir tout jouer, et donc de tout jouer. Des premiers enregistrements lo-fi dans les 90’s (God Ween Satan, The Pod, Pure Gueva) jusqu’aux récents albums plus confidentiels (Quebec, Shinola, La Cucaracha), en passant par les grandes épopées pop sur la major Elektra (Chocolate and Cheese, The Mollusk, White Pepper), à l’exception d’un album enregistré en 1996 à Nashville et exclusivement composé de chansons country (12 Golden Country Greats, qui ne comporte en fait que…10 titres), Gene et Dean Ween ont rendu hommage, pastiché, réinterprété, revisité ou tout simplement refait tous les plus célèbres songwriters pop de l’après-guerre : Prince, Bowie, George Harrison, Paul McCartney, Motorhead, Phil Collins, parmi tant d’autres. Jouant avec virtuosité de tous les genres musicaux (pour des concerts qui peuvent durer jusque trois heures de temps), pop, rock, métal, reggae, samba, jazz, folk, funk, blues, chansons de marins, new-wave, Ween sait tout jouer (Gene Ween, joint par téléphone : « Il faut de toutes les couleurs dans le homo-rainbow. »). Quelque part entre les Rutles (le groupe des Monty Python qui pastichait les Beatles), Spinal Tap ou les Residents, Ween est le groupe post-moderne ultime, qui synthétise toute notre culture pop, mieux que les Beatles (car les Beatles sont morts), mieux que Beck, copiste scientologue. Car les frères Ween, plutôt situationnistes humanistes, sans mauvaise conscience ni ressentiment, font en sorte que leurs reproductions soient souvent mieux que les originaux (de meilleure chansons, de meilleures interprétations, de meilleures idées), et les condamnent au néant, en les synthétisant, les résumant et en les ramassant en une seule pièce parfaite. La pop music semble condamnée à n’être qu’un ensemble de brouillons dont Ween tirera les versions définitives. Ainsi, après le It’s Gonna Be A Long Night de Ween, toute autre chanson de Motorhead semblait être devenue la répétition du détournement de Ween, ou « le plagiat par anticipation » du morceau de Ween, forcément meilleur. Ainsi les disques de Prince sont-il devenus moins bons depuis Chocolate and Cheese. Comme si Gene et Dean, vampires-incubes paillards et rigolards sous l’influence de leur dieu Boognish, avaient vidé de son sang et de son âme le petit Roger Nelson pendant son sommeil, devenu livide pantin désarticulé. Toute la discographie de Ween est ainsi à entendre comme une entreprise anarchiste (et salvatrice) de dévitalisation de la pop culture, et le meilleur exemple en est l’album White Pepper : dérobant son poivre au Sergeant Pepper des Beatles, Ween l’affadissent, le blanchissent, l’essorent, et lui enlèvent volontairement tout son piquant, pour nous révéler la vérité derrière les apparences, l’imposture que constitue la culture de masse (processus identificatoires, vampirisme, idolâtrie), le néant qu’elle recèle.

Faiseurs de honte

Car les frères Ween ne se contentent pas de juste mieux reprendre des formes éprouvées, ils produisent aussi dans leurs réinterprétations des commentaires sur la musique pop, par l’exagération et la dérision : ainsi le pied de batterie énorme sur leur dernier titre reggae, The Fruit Man ; ainsi l’utilisation outrancière de l’auto-tune (programme qui permet d’ajuster les voix à la bonne tonalité sur Protools) sur Spirit Walker, qui renvoie Cher, Madonna et Mercury Rev dans l’espace infini où personne ne les entend chanter. L’exagération des effets est une manière ici de dénoncer la prééminence des moyens sur les fins dans la pop, et la plupart des chansons de Ween relèvent de tels questionnements politiques, éthiques, qui mettent à l’épreuve la manière de vivre et de penser, la moralité de leurs auditeurs. Selon Aaron, « Ce que nous essayons de faire avec la musique, c’est de sortir les hommes de la boue. Je vois tellement de transparence, de faiblesse, de consumérisme aveugle dans la société d’aujourd’hui… La règle de Ween, c’est : nous allons vous tester. Nous essayons toujours d’isoler les gens et s’ils ne sont pas cools, ou ‘politiquement corrects’, nous essayons de trouver leurs faiblesses et de les exploiter, pour le bénéfice du monde (rires). Notre chanson Shamemaker (‘When I feel ashamed / It makes me so scared/ It makes me want to hurt you / Shame makers’) est souvent très mal reçue, les gens nous disent ‘Oh, mon Dieu, je ne peux pas supporter ça’ et on leur répond ‘Ok, n’écoute pas, vas donc essayer de sauver les ours polaires’. Si tu n’es pas capable d’écouter Ween, on ne veut pas de toi. »

Caractère destructif

Le merveilleux second degré de Ween passe évidemment par les paroles des chansons, qui se permettent toute les licences « explicites », comme You fucked up sur God Ween Satan, écrit en l’honneur de la belle mère de Aaron (« You fucked up / You bitch / You fuckin’ nazi whore »), ou With my bare hands, sur La CucarachaShe's gonna be my cock professor / Studying my dick / She's gonna get her masters degree / In fuckin' me ») et si certaines âmes sensibles ont vus dans les lyrics de Ween de la violence, de la vulgarité ou du racisme (comme un acteur parfait, Gene Ween peut chanter avec une multitude de styles différents : l’accent irlandais, noir-américain, jamaïcain, porto-ricain, etc.), ils ont le même rôle cathartique et exultant que chez les frères Farrelly, South Park ou Andy Kaufman. « Notre influence principale est Randy Newman, qui a fait toute sa carrière avec des chansons comme Rednecks, qui parle de « smart ass new-york jews » de « niggers » ou de « redneck jews ». Il n’était pas raciste mais il essayait juste de voir à quel point votre peau était fine et si vous étiez capable d’écouter son message. Si vous n’aviez pas la sagesse de supporter tout ça, alors vous ne pouviez pas apprécier son art. De la même manière, Ween n’est pas juste un groupe de blagues. ». De fait, certaines personnes peuvent être sincèrement émues par des chansons de Ween, comme celle qui clôt La Cucaracha par exemple, Your Party, chanson de quadras rangés qui remercient leur hôte pour la fête (« We had the best time at your party / The wife and I thank you very much »), sur des soli du saxophoniste smooth David Sanborn. La party est finie, et ce pourrait tout aussi bien être aussi la fin du monde, se dit-on à l’écoute de cette parfaite bluette sentimentale… Il y aurait tout un livre à écrire sur Ween et la place nous manque. Disons qu’ils sont de géniaux songwriters, de gentils vampires, de vrais amis, enfin des caractères destructifs, qui font le vide, qui font de la place, pour que naisse une nouvelle aurore. Vive Ween.

10 mars 2008

Les archives du Weenbeat fanzine : 2ème partie

Quelques minutes après Claude, votre serviteur se retrouve en face du même Gene pour un blind-test accéléré : faute de temps (20 minutes, planning promo oblige), nous n'écouterons pas les disques. Je laisse donc notre homme réagir spontanément à mes diverses suggestions, et qui sont la plupart du temps tirées de l'incroyable lot de reprises dans lequel le groupe puise chaque soir.

band_on_the_runBand on the Run : The Wings (sur « Band on the Run », 1973, EMI)
Gene : C'est un disque qui appartenait à ma mère, je l'écoutais beaucoup. J'ai dû le découvrir à sa sortie, je devais avoir 8 ou 9 ans. A l'époque, je ne savais pas du tout qu'il s'agissait d'un ex-Beatles. Le premier disque des Beatles que j'ai écouté était « Sergent Pepper's Lonely Heart Club Band, the Soundtrack » (avec The Bee Gees, Peter Frampton, Alice Cooper, Aerosmith... - nda), je l'ai acheté après avoir vu le film. Mais je ne savais rien des Beatles à l'époque, je l'ai acheté parce que c'était la bande originale. Ensuite j'ai entendu le véritable album des Beatles, mais les versions étaient beaucoup moins bonnes (rires). Je ne m'en vante pas souvent.

Tu préfères les Wings aux Beatles ?
J'adore les premiers disques solo de Paul Mc Cartney, en particulier "Ram". Sinon je n'ai pas de préférence.

Tu penses que les Wings ont pu avoir une influence sur Ween ?
Certainement. Mais je crois bien que, malgré toute l'admiration que je peux avoir pour Paul Mc Cartney, c'est John Lennon qui m'a le plus marqué dans ma façon d'écrire.

Black_Sabbath_Paranoid_320135Paranoid : Black Sabbath (sur « Paranoid », 1971, Warner)
J'étais en train de fumer de la marijuana la première fois que j'ai entendu ce disque, je planais vraiment. Je devais avoir 16 ou 17 ans, un jour de neige. C'était intense. J'adore Ozzy Osbourne. C'est une des plus grands rock stars au monde.

Tu as un album préféré dans sa discographie ?
Probablement « Paranoid ». Et la compilation "We Sold Our Soul For Rock & Roll". Ozzy a beaucoup influencé ma manière de chanter. Je sais l'imiter à merveille.

toddI Saw The Light : Todd Rundgren (sur « Something/Anything ? », 1972, Bearsville/Rhino)
C'est vraiment une découverte très récente. Auparavant, je détestais. Je crois qu'il faut vraiment une certaine maturité pour l'apprécier. C'est grâce à un ami qui habite une maison sur les rives du New Jersey que j'ai pu me faire un nouvel avis sur lui. Nous buvions des Rhum-Coca et nous écoutions de la musique ensemble, il faisait chaud et il a eu la bonne idée de mettre "Something/Anything ?". Je suis allé l'acheter peu après. Mais c'est le seul disque de lui que j'ai. Je l'aime beaucoup, surtout le disque 1.

Il a été question qu'il produise « White Pepper »...
Oui, il était sur le point de le faire. Mais c'est nous qui avons refusé. Il nous a fait un peu peur. Il demandait beaucoup d'argent C'est un peu comme un forfait : tu le payes et il réalise ton disque de A à Z. C'était vraiment trop risqué : on avait peur de se retrouver avec un disque qui ne nous plaise pas et qui aurait coûté très cher. Je crois que la goutte qui a fait déborder le vase, c'est quand il nous a expliqué qu'il allait tout faire en numérique, sans utiliser la moindre bande magnétique. Avec tout le respect que je lui dois, je crois que nous ne nous serions pas entendus.

19991999 : Prince (sur « 1999 », 1983, Warner)
Quand j'étais adolescent, j'habitais dans un complexe immobilier où je traînais souvent avec deux filles, Sharon et Cheryl. Ce sont elles qui m'ont fait découvrir "Little Red Corvette". Au lycée, ensuite, tout le monde écoutait Prince. Ce n'est vraiment qu'avec « Purple Rain » que j'ai commencé à m'intéresser à lui. Je le considère encore comme un chef d'oeuvre. Sur ce disque, son génie est tellement évident. J'aime beaucoup sa façon de chanter et son attitude, cette façon d'être à l'aise partout. J'essayais vraiment de lui ressembler quand j'étais ado.

Que penses-tu de sa carrière ?
Tous les problèmes qu'il a rencontré avec sa maison de disques l'ont vraiment fait péter les plombs. Mais c'est un génie, un excentrique de première, et tu ne peux pas t'attendre à ce que sa production soit toujours au niveau. Il a aussi déconné, comme l'a fait John Lennon dans les années 70. Quoi qu'il fasse aujourd'hui, j'ai toujours le plus grand respect pour lui. Il a vraiment écrit des classiques.

Tu l'as déjà rencontré ?
Non, je suis déjà allé dans ses studios, à Paisley Park, mais je ne l'ai jamais vu. Je crois que je serai très impressionné. C'est vraiment un de mes héros. Je ne saurai pas quoi lui dire.

The_Doors_LA_Woman_333667Riders of the Storm : The Doors (sur « L.A. Woman », 1971, Elektra)
Il y a encore 5 ans, je détestais ce groupe. Mes parents étaient tous les deux des grands fans, et j'ai vraiment grandi en écoutant leurs disques. Quand nous avons signé avec Elektra, nous avons reçu tous  les deux l'intégrale des Doors. C'est à partir de là que j'ai commencé à réécouter leurs disques avec une autre oreille, en particulier « LA Woman ». Mais je ne suis pas un fanatique non plus.

Ohio : Neil Young (sur « Déjà Vu », 1970, Warner)
Je suis un énorme fan de Neil Young. Je le mets au même niveau que Prince. Comme beaucoup de gens, j'ai appris à jouer de la guitare en écoutant les disques de Neil Young parce qu'il utilise des accords très simples. Si tu connais les accords en D, C et G, tu peux jouer la plupart de ses chansons. J'aime beaucoup toute la période "Harvest". Je crois même que la première chanson que j'ai appris à jouer était "Tell Me Why", sur "After the Goldrush". Pour Mickey, c'était "Ohio".

Close_20My_20Eyes_20Forever_Remix_Duet_20With_20Ozzy_20Osbourne_CD_20Promo_Close My Eyes Forever : Lita Ford/Ozzy Osbourne (sur « Lita », 1988, RCA)
Mon ancienne copine avait acheté ce titre sous la forme de cassette-single, et elle l'a oublié dans ma voiture quand elle est partie. Je l'ai écouté très souvent. Je n'aimais pas beaucoup cette chanson, mais je l'ai écouté tellement de fois au volant qu'elle a commencé à me rentrer dans la tête.

Hot For Teatcher : Van Halen (sur « 1984 », 1984, Warner)
Tout le monde dans le groupe adore Van Halen. C'est un morceau qu'on a commencé à jouer pendant les balances,  jusqu'à se rendre compte qu'on le maîtrisait plutôt bien. J'aime beaucoup l'énergie derrière Van Halen, ce truc très adolescent : boire des bières, conduire à fond, aller en boîte lever des filles... (rires). Je n'ai pas d'album favori, c'est juste certaines chansons. C'est Mickey le vrai fan.

no_more_tearsNo More Tears : Ozzy Osbourne (sur « No More Tears », Epic, RCA)
Je ne sais pas pourquoi on a enregistré cette chanson. Je suppose qu'on était complètement défoncés. J'arrive à chanter exactement comme lui, alors c'est très amusant à faire.

Tu me conseilles un de ses albums solos ?
Les deux premiers. "Diary Of A Madman". Mais de toute façon, il y a de bons morceaux sur tous ses albums solos.

snoop_doggy_dogg_doggystyleJin & Juice : Snoop Dog (sur « Doggystyle », 1993, Death Row)
Deux disques que je ne me lasserai jamais de recommander : « Doggystyle »  de Snoop et "The Chronic" par Dr Dre. Mickey et moi étions complètement obsédés par eux quand ils sont sortis. Je crois que nous n'avions rien écouté d'autre pendant deux ans J'adore le hip-hop, qu'il vienne de la côte Est comme de la côte Ouest. Ça dépend plus des artistes que de la provenance. J'aime aussi beaucoup "The Carnival" par Wycleef Jean, je l'écoutais encore hier soir. Le Wu-Tang, Biz Marquee...

C'est un style qui ne vous a jamais tenté ?
Non. Je n'oserai pas. Ce n'est pas mon style.

doobieTakin'It To The Streets : Doobie Brothers (sur « Takin'It To The Streets », 1976, Warner)
C'est un bon groupe. Mon préféré, c'est Michael Mc Donald, mais il a juste été dans le groupe pendant deux ans. J'arrive aussi assez bien à l'imiter, Mickey me demande toujours de le faire. C'est un truc typiquement américain : s'asseoir sur le porche de sa maison, faire des steaks au barbecue, boire une Budweiser , rouler un joint et écouter les Doobies (rires). C'est dur à expliquer à des Européens (rires).

24 février 2008

Les archives de Weenbeat fanzine : 1ère partie

ween_11Les interviews de Ween ne sont pas légions dans la presse française : mis à part Chronic'art, aucun magazine ne semble avoir eu envie d'adresser la parole au groupe depuis la sortie de La Cucaracha. Claude Freilich, du magazine Crossroads, a rencontré Gene Ween à Paris quelques heures avant le concert du groupe à la Boule Noire en 2001. Il a utilisé une partie de cet entretien dans le cadre de son article, mais il demeure inédit dans son intégralité. Je lui avais demandé la permission de l'utiliser pour un numéro de Weenbeat Fanzine qui n'est jamais paru... Maintenant que ce blog existe, j'ai enfin l'occasion de lui rendre justice ! Je publierai également dans quelques jours la retranscription du blind-test auquel j'ai soumis Gene le même jour, lui aussi inédit.

Claude Freilich : Quelle transition entre “White Pepper” et ce que vous faisiez sur “The Mollusk” ? Vous semblez avoir privilégié une approche plus simple...

Gene : Tout est venu du fait que nos compositions se sont avérées plus directes Nous nous sommes dits qu'elles seraient plus appréciées si c'était nous qui les enregistrions et si nous le faisions en studio, de manière professionnelle. Nous ne nous imposons jamais de limitations et il s'est trouvé que ces chansons étaient plus "pop" qu'autre chose. C'est pour cela que nous avons poussé cet aspect à l'extrême.

Auparavant, même si vous ne sortiez pas de "concept album" au sens strict du terme, il y avait toujours comme un fil, qu'il soit constitué par des collages, des éléments surréalistes ou autres idiosyncrasies ?

Oui, je crois qu'il est bon de passer à quelque chose de différent. (rires)

Subliminalement avec ce titre et cette pochette blanche on ne peut pas ne pas penser à qui vous savez ! (Rires)

Oui nous sommes tous deux des grands fans des Beatles. Je n'aime pas avoir à l'admettre car on a toujours l'air un peu idiot en disant ça mais c'est vrai. Notre producteur un jour nous a dit : " Peut-être que ce sera votre Sgt. Pepper's ou votre White Album !"

On se demande toujours jusqu'à quel point il n'y a pas chez vous une démarche parodique, comme sur « Pandy Fackler » qui semble tout droit sorti de Steely Dan.

Il n'y a aucun pastiche. Je m'en défends toujours. En fait nous sommes aussi des inconditionnels de Steely Dan et nous aimons tout deux la musique sincèrement. Nous en écoutons tellement que quand nous écrivons un morceau nous allons comme naturellement utiliser des éléments empruntés à d'autres artistes Mais à chaque fois que nous sonnons comme tel ou tel artiste c'est parce que nous l'aimons et ceci n'a rien à voir avec une quelconque satire.

Comment conciliez-vous cet élément de loufoquerie et de "fan attitude " ?

Ça n'a rien de conscient J'aime faire des chansons toutes simples et je n'aime pas les musiques qui manient la dérision et la distanciation. Quand vous entendez quelque chose, ça doit avoir un impact sur vous, ça peut vous rendre amer ou extatique, aussi je ne vois pas l'intérêt d'essayer de déboulonner un genre ou de le tourner en ridicule.

En même temps votre musique a toujours véhiculé un côté "fini "...

Oui, mais cela vient du fait que nous écrivons sur des sujets qui traitent de la vie en général et quand vous commencez à parler de cela vous êtes amené à parler de l'amour, des soucis, de l'absurdité de certaines choses et c'est à partir de cela que nous approchons la musique. Dans ces cas-là, l'humour ne peut que naturellement faire surface. Je ne vois rien le mal à cela, quand vous mettez ce type de choses en exergue, les gens pensent que vous êtes des comiques troupiers, mais vous et moi comprenons que nous ne faisons que nous divertir ! (Rires)

Comment vous viennent vos idées et démarrez-vous toujours sur le côté incongru des choses ?

C'est assez variable. Souvent la musique vient d'abord et nous essayons de visualiser un contenu verbal qui pourra s'y greffer. Ensuite nous trouvons un titre accrocheur et nous écrivons alors la chanson. Souvent pourtant, et surtout dans cet album, nous adoptons la technique du « courant de conscience ». Sur “She's Your Baby” par exemple, nous avons laissé les mots grandir d'eux-mêmes et nous avons privilégié l'écriture automatique. Dans ces cas-là vous ne vous préoccupez plus du sens qu'ils peuvent avoir et vous ne vous demandez même plus qu'ils ont un sens ou non

Vous sentez-vous proches d'écrivains du courant de conscience comme Virginia Woolf, James Joyce ou Henry James ?

Tout à fait. C'est dans ces moments-là que vous avez l'impression de puiser dans ce qui se passe au plus profond de votre cerveau ; c'est ce que nous appelons " The Node ". C'est cette petite sphère que nous avons tous et c'est toujours assez drôle de laisser les gens décrypter les puzzles que nous leur présentons ! C'est un jeu qui pour vous a un sens mais jamais au niveau du conscient et c'est cela qui est intéressant ! C'est notre définition du " cool " (Rires)

Y-a-t-il pour Ween la volonté de subvenir la perception des gens ?

Oui, en quelque sorte. C'est pour nous une manière de filtrer nos fans : faire en sorte que ceux qui puissent être désarçonnés par le fait que nous fassions un album " country " soient éliminés. Les gens doivent être capables d'accepter quoi que ce soit que nous leur proposions puisque ça fait partie de notre démarche.

Éclairez-moi. “Falling Out” doit-il juste être perçu comme une simple chanson country ?

Absolument, c'est un titre qui parle d'un de nos amis et dans lequel nous avons voulu véhiculer une certaine émotion. Nous sommes des fans de musique country et nous avons fait venir des musiciens de Nashville pour jouer dessus et même tourner avec nous.

Parlez-moi de votre tournée country...

C'était un autre moyen de dérouter nos fans et nous ne cherchions pas à figurer dans les charts country. (Rires) On ne peut pas dire que ça a soulevé les foules mais aujourd'hui c'est un genre qui redevient populaire et quelques personnes l'ont apprécié. Le plus étonnant est que ce soit surtout en Angleterre que ça a bien marché.

Votre humour est plus proche du " nonsense " anglais que de la grosse artillerie US non ? (Rires)

Au départ oui, nous nous sentions beaucoup d'affinités avec l'Europe mais aujourd'hui nous faisons des efforts conscients pour percer le marché américain. Nous tournons beaucoup là-bas mais c'est un pays si énorme ! Nous avons quand même réussi à jouer à Austin devant 5.000 personnes et ça s'est très bien passé. A San Francisco nous sommes plutôt populaires, à New York aussi.

Comment vivez-vous lofait d'être appréciés des critiques mais relativement ignorés du public ?

A cet égard, on pourrait presque nous voir comme des Européens se concentrant sur la meilleure manière de réussir aux States. (Rires)

Pour en revenir à « Falling Out », il y a quand-même des éléments peu orthodoxes, la voix par exemple...

C'est avant tout un morceau traditionnel avec des guitares acoustiques, nous avons juste un peu compressé les vocaux qui lui ont donné un son « à la Kinks ». Ça reste néanmoins une chanson simple et directe.

“The Grobe” m'a fait penser à de l'acid rock et à un groupe US de la fin des 60's nommé The Blue Cheer.

Oui, le nom me dit quelque chose. C'était tout à fait ça : de la fuzz, de la distorsion, etc... La genèse en été purement acoustique puis nous nous sommes rendus compte qu'il nous fallait lui donner ce traitement heavy et saturé.

Comment s'opèrent en général vos idées d'arrangements ?

Sur ce titre par exemple, c'était lié aux paroles et à l'ambiance du morceau. Nous nous sommes dit qu'il fallait même intensifier cet aspect et nous avons ralenti “The Grobe” à l'extrême.

Le nom "Grobe" a-t-il un sens ?

C'est encore notre procédé du courant de conscience. Il nous est venu comme ça et sa sonorité colle parfaitement à l'atmosphère du titre. Nous aimons bien inventer des noms, "Ween " par exemple est un néologisme comme en font les gosses : il amalgame "Wuss" qui veut dire "chatte" et "Peen" qui signifie « pénis » ! (Rires)

En tant que duo de qui vous sentez-vous les plus proches ?

J'ai une démarche de fan, aussi j'ai des affinités avec tous les artistes que j'adore. Bien sûr mon duo idéal est Lennon-McCartney.

Et si je vous demandais si vous vous voyiez comme des non-conformistes ou comme des sorciers de studio à la Todd Rundgren ?

Je vois ce que vous voulez dire (Rires). Contrairement aux apparences nous ne sommes pas très créatifs en studio, nous ne sommes pas ce qu'on appelle "a smart band" (un groupe futé). On est assez bricoleurs en fait et on aime enregistrer aussi vite que possible : la quantité plutôt que la qualité, ce qui est une forme de paresse. (Sourires)

Je n'en suis pas si sur ! (Rires)

On est un peu entre ces deux catégories : j'adore être en studio et à la base, j'adore m'entendre sur les bandes, et Dean aussi d'ailleurs ! Oui, je me sens effectivement beaucoup d'affinités avec Todd, et aussi avec tous les francs-tireurs du rock.

Le fait qu'on ait du mal à vous catégoriser est-il une chose sur laquelle vous jouez ?

Ça nous plaît bien mais nous ne pensons pas vraiment à cela. Nous sommes avant tout des songwriters, l'habillage vient par la suite mais nous sommes plutôt désinvoltes à cet égard. On ne fait pas trop d'efforts !

Vous êtes des cossards intellos en fait !

En un sens oui. Mais on travaille beaucoup à ne pas être perçus comme des intellectuels ! (Rires)

Sexe et Drogues et Rock ? (Rires)

On pourrait le formuler de cette façon (Rires). Oui, "cossard intello", ça me convient bien ! Tant qu'on ne nous prend pas pour des benêts.

Comment trouvez-vous alors l'équilibre entre la désinvolture et le sérieux ?

Nous sommes assez relaxes en studio mais nous n'abandonnons un morceau tant que nous n'en sommes pas satisfaits. Les gens qui nous comprennent nous prennent au sérieux, nous essayons juste de créer un son qui soit adéquat.

Quelle est votre définition du "Ween Sound'' ?

Une bonne mélodie et de bons textes se conjuguant pour façonner des chansons toutes simples que n'importe qui pourrait écouter.

Que viennent faire des instrumentaux comme “Ice Castles” alors ?

C'est un exercice de style psychédélique avec des effets spéciaux visant a créer un rendu cotonneux.

El de quel parolier Ween se seul-il le plus proche ?

J'ai beaucoup emprunté à Randy Newman. II est très sarcastique mais en même temps ses observations sont toujours réalistes et fort judicieuses. Il ne se moque pas véritablement de ce qu'il dépeint ou alors il se moque également de lui-même.

5 février 2008

Flashback

playlistMexicola demandait dans un commentaire laissé hier : "quel souvenir gardez-vous du passage de Ween en 2003". Et même si Arnoz lui a déjà répondu, je n'ai pas pu m'empêcher de mettre en ligne le compte-rendu que j'avais réalisé à l'époque, histoire de convaincre les derniers indécis (s'il en reste).

Vingt-quatre heures après que les lumières se sont rallumées, j'entends encore ce sifflement au fond de mes oreilles. Il faut dire qu'en prenant place au premier rang, appareil numérique à la main, j'avais pris des risques. Dont celui de me prendre trois heures de Ween dans la face. Et ça n'a pas raté : même si les conditions techniques n'étaient pas aussi bonnes qu'à la Boule Noire il y a trois ans (le groupe se plaint de ne pas avoir de retours, des techniciens s'activent sans succès), les frangins ont balancé la sauce jusqu'à épuisement du public. Quelques minutes avant le début du concert, les rumeurs courent bon train : Claude Colman (batteur), victime d'un accident de la route l'an dernier, sera-t-il sur scène ce soir ? Que cache le fait que Dean Ween ait autant maigri ? La date est-elle complète ?

Ween, c'est devenu une affaire de famille. Celle formée par une légion de fans, venus de Rennes comme de Bordeaux ou de Strasbourg pour répondre à l'appel du Boognish un soir de décembre alors qu'il pleut et que personne, je dis bien personne, n'a jusqu'ici accordé à leur dernier album, sorti en août dernier, l'attention qu'il mérite. Et pourtant Quebec rappelle ce que Ween sait faire de mieux : un condensé de 30 années de rock américain relevé au poivre blanc et au sirop d'érable. Ce groupe est depuis ses débuts inqualifiable, mais tâchons de le résumer ainsi : deux adolescents s'étant hissés pieds nus à la hauteur de leurs idoles. Black Sabbath, Wings, Prince, Hendrix, Motörhead, Doobie Brothers, Van Halen, Neil Young... Ween les a tous assimilés pour aujourd'hui dépasser la somme de leurs influences. Même quand ils sont en tournée depuis 6 mois, ils trouvent encore l'énergie de retourner pendant deux heures trente 400 fans en transe.

La sortie européenne du petit dernier ayant été tardive, ils ont choisi de ne pas trop s'appuyer dessus pour élaborer une setlist qui passe tous leurs albums en revue (et presque l'intégralité de The Mollusk), des premiers énervements en basse fidélité jusqu'à la consécration des studios et la signature sur une major. Revenus de tout (Finalement en licence sur le label Sanctuary, ils ont failli revenir à l'autoproduction), partis de nulle part ou presque (Trenton dans le New Jersey), Ween compte un public de fidèles très en avance sur les nouvelles technologies : des sites internet ont permis très tôt aux fans disséminés de par le monde d'échanger informations, documentation et fichiers audio/vidéo, ce avec la bénédiction du groupe qui a toujours encouragé l'enregistrement de ses concerts. A une seule condition : qu'ils ne soient jamais vendus. Régulièrement, des kamikazes tatoués du Boognish font exploser sur Ebay la cote des CD gravés n'obéissant pas à cette loi afin que personne ne soit tenté de les acheter. L'équivalent de quinze albums inédits, composés de démos, d'archives et de live, sont en effet gracieusement mis à disposition de ceux qui font l'effort de les chercher. Les nombreux sites régulièrement mis à jour donnent les indices qu'il faut pour les trouver. Une webradio diffuse 24h/24 des archives sonores inépuisables, véritable torrent de classiques captés lors de leurs nombreuses tournées et de performances extravagantes. Et bientôt une webtv et un logiciel de peer-to-peer qui leur sera exclusivement dédié. 

Ween n'a jamais flirté avec le succès. Dean & Gene sont souvent l'objet de malentendus, comme celui qui consiste à croire qu'ils ne sont que d'habiles imitateurs, voire des champions du second degré. Pourtant tout dans leur musique n'est que fervent hommage aux géants de la pop music : sous leurs allures d'iconoclastes (ils détournent sur leur deuxième album la pochette du Greatest Hits de Leonard Cohen), ce sont de réels passionnés qui, toujours à l'encontre des modes, savent à chaque fois étonner par leur savoir-faire excentrique. Dire que Beck leur doit beaucoup est une litote. Les Daft Punk en sont fans. Et vu le nombre de musiciens qui se pressent à chacun de leurs concerts (encore hier soir à Paris : Herman Düne, The Married Monk, mais aussi Bosco, Alex Gopher...), leur réputation n'est plus à faire. Car c'est aussi un phénomène scénique intense, jouant la carte de la générosité là où beaucoup se contentent du minimum. Ceux qui les ont vu une fois en redemandent, rien que pour le plaisir de hurler à nouveau les paroles de You Fucked Up, le morceau qui ouvre leur premier album paru en 1990, vibrante déclaration à la belle-mère de Gene (« You fucked up/You bitch/You really fucked up/You fuckin' nazi whore... »). Même si le répertoire d'hier soir était complètement différent de celui d'il y a trois ans (les classiques tels que Freedom of 76 ou Voodoo Lady ont été mis de côté au profit de morceaux plus rares comme Now I'm Freaking Out ou Greg the Bunny), ils n'ont pas oublié You Fucked Up et j'ai sué, hurlé, dansé, remercié, rappelé tout ce que j'ai pu.

Ils sont revenus deux fois, histoire de lâcher quand même un extrait du petit dernier (Zoloft, un hymne aux anti-dépresseurs) et Buenos Tardes Amigo, ce western-spaghetti musical qui les a fait connaître du public français. Parmi les premiers rangs, les paroles sont sur toutes les lèvres : « You killed my brother last winter/You shot him three times in the back/In the night I still hear Mama weeping/Oh Mama, still dresses in black »).

Les lumières rallumées, tout le monde est un peu sous le choc. Les mots ont du mal à retranscrire l'émotion vécue. Alors que les conversations vont bon train, Dean Ween tente de se frayer discrètement un chemin vers le bar. A sa plus grande surprise, il est accueilli par une ovation digne d'un chef d'État. Pas de répit pour l'idole fatiguée.

Avant que je finisse par regagner mes pénates, François me faisait remarquer combien il est bon d'être fan d'un groupe. Mis à part deux frangins barbus et leur cousin suisse, je n'en connais pas d'autres que Ween qui méritent autant l'amour qu'on peut leur donner. Et qui vous le rendent au centuple, en monnaie de singe marqué d'un petit logo hirsute que certains se sont déjà fait tatouer en signe d'indélébile d'allégeance. Ween, c'est plus qu'une histoire de culte. C'est à la vie à la mort. A nos nuits, à nos jours. A l'éternel retour de la chance. Et du Québec libre.

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3 février 2008

Ween à Paris le 11 mai prochain !

La nouvelle m'avait été annoncée dans la semaine, et je cherchais le bon moment pour vus en parler, ne sachant pas encore si elle était officielle ou pas. Mais j'ai été pris de cours par mes lecteurs : un mail d'un fan particulièrement vigilant, et puis un commentaire laissé sur ce blog hier soir par l'irréductible Martial, qui propose l'organisation d'un bus Bordeaux-Paris pour venir voir le concert (voir commentaires du précédent post) ! C'en est trop et je suis obligé de lâcher l'info : Ween sera en concert à Paris, à la Maroquinerie (comme la dernière fois, il y a 5 ans), le dimanche 11 mai 2008. A ce que j'ai pu voir, la location n'est pas encore ouverte, mais retenez votre soirée : It's Gonna Be A Long Night.

ween_bandeau

7 décembre 2007

Greek Cheese

RangetesDisques

20 novembre 2007

La Cucaracha : l'avis de Glide Magazine

cuca"S'est-il vraiment écoulé 4 ans depuis que ces stakanovistes du do-it-yourself que sont Gene et Dean Ween nous ont offert un album studio ? Oui, c'était en 2003 avec Quebec, si l'on omet quelques sorties plus secondaires dont le groupe nous a gratifié (car il s'agit bien désormais d'un groupe, composé également de Claude, Dave et Glenn).

Depuis La Cucaracha, Gene est supposé aller bien mieux physiquement et mentalement. Tant mieux pour lui, mais la question qui nous intéresse est : dans quelle mesure cette amélioration va t-elle avoir des conséquences sur la créativité aussi débridée que prolifique du groupe ? Ween va t-il devenir aussi normal que Wilco, avec des textes de la trempe de "Maybe Sun Will Shine Today" ? Pas tout à fait.

Depuis l'instrumental qui ouvre l'album dans une ambiance de dessin animé à la soul moite de "Blue Ballon", La Cucaracha résume ce que Ween sait faire de mieux : fusionner sans effort les genres. Le thème des relations qui unissent les êtres semble être le fil rouge de l'album, depuis le presque sincère "Friends", le terne "Object", le sommet de vulgarité que constitue "With My Own Two Hand" où Dean chante : "Elle va être mon professeur de bite/Etudier ma queue/Elle va passer son diplôme de maîtrise à me baiser". Malgré ça, il se rattrape vis à vis du public féminin sur "Sweetheart of the Summer", qui comporte quelque chose de la Motown dans sa trame.

Que ce soit avec le reggae barré de "Fruit Man", le mysticisme satirique de "Spirit Walker" ou la tendresse à bon marché de "Lulabby", La Cucaracha prend le parti de faire le grand écart le long de ses 13 titres. Sans parler de cette jam de 11 minutes qui vire par moments au progressif, "Woman and Man", ni du très 80's "Your Party" qui clôt l'album, accompagné par un invité de marque : le saxo de David Sanborn.

Le Ween qui nous offre La Cucaracha n'est pas celui auquel on doit Chocolate and Cheese ou The Mollusk. Le même si le résultat manque de consistance, il comporte quand même 3 ou 4 perles qui vous feront y revenir."

8 novembre 2007

Schnitzel Records

schnitzel_records_logoMême si le label existait déjà, le nom de Schnitzel Records est apparu pour la première fois au dos d'un disque de Ween avec la sortie européenne de Shinola Vol.1 en 2005. Et depuis, il n'a pas chômé au niveau nouveautés : vinyles collectors (Ween Live in Toronto, maxi "Monique The Freak", single "Gabrielle"...), réeditions (l'incontourable Chocolate & Cheese, également à nouveau disponible en double vinyle comme à l'origine, mais aussi les deux premiers Moistboyz) et nouveautés (un nouvel album de Chris Harford, Moistboyz IV). Le couronnement de cette entreprise vient évidemment avec la publication de La Cucaracha, le vrai nouvel album de Ween, qui nous sert de prétexte à passer Oliver, un de ses responsables, à la question.

Te souviens-tu de la première fois que tu as entendu parler du groupe ?

Oliver : J'ai découvert Ween au milieu des années 90. Un ami n'arrêtait pas d'écouter « You Fucked Up », sur God Ween Satan, et j'ai immédiatement adoré. J'ai commencé à m'intéresser à tout ce qu'ils avaient publié et ils ne m'ont jamais déçu. Même si Ween n'était pas sur Schnitzel, ça resterait un de mes groupes favoris de tous les temps ! J'ai rencontré Greg Frey, le manager de Ween, par l'intermédiaire d'un groupe de Detroit qui s'appelle The Waxwings et qui a été la deuxième sortie du label. Greg est également le manager de Dean Fertila, qui est le chanteur et cerveau du groupe. Comme Schnitzel est un label indépendant dont les disques sont distribués dans le monde entier même si nous sommes basés à Londres, ça semblait être une bonne idée de proposer à Ween de s'occuper d'eux. Je crois que le soin qu'on porte autant au packaging qu'au choix des artistes avec lesquels on travaille a fini de les convaincre.

Après Chocolate & Cheese, vas-tu rendre à nouveau disponible tous les anciens disques ?

Je te rassure, il y en d'autres à venir...

Comment décrirais-tu ta relation avec le groupe ? C'est facile de bosser avec eux ?

Il n'y a qu'un seul groupe comme Ween. Schnitzel est juste un media par lequel ils ont la possibilité de pouvoir s'exprimer. On fait toujours notre possible pour que l'artiste parvienne à se présenter comme il le souhaite à la fois au public comme à lui-même.

Vous êtes combien à bosser à Schnitzel ?

Ca dépend des sorties. Ca change selon qu'il s'agit d'une sortie internationale ou non. On délègue certaines responsabilités comme la promo, mais on est toujours au moins quatre à la base.

Quels ont été tes premières réactions la première fois que tu as entendu La Cucaracha ?

Comme à chaque nouvel album de Ween... plein de surprises... Comme une sorte de festin musical pour adulte qui ne cesse de s'améliorer à chaque écoute.

Ween a toujours adopté une politique très permissive en matière d'échange de fichiers sur le net. En tant que maison de disques, quel est votre point de vue ?

Tant qu'il s'agit d'enregistrements de concert, nous encourageons les fans à les échanger.

Le nouvel album a fui assez rapidement sur le net. Tu penses que ça augmente la notoriété du groupe ou qu'au contraire ça diminue les ventes potentielles ?

C'est difficile à dire. Comme je te disais tout à l 'heure, on est toujours très attentifs à la qualité des disques qu'on publie. Et je ne pense pas qu'un rip de l'album à 128 kbps puisse rivaliser avec un vinyle pressé en 180 grammes ou un Cd entièrement jaune comme c'est le cas du Friends EP. Le prix qu'un consommateur va dépenser pour un digipack, par exemple, qui durera longtemps et qui est un support artistique, ce n'est vraiment rien. Quelle autre forme d'art peux-tu acheter pour si peu cher ?

Je suis très admiratif que vous publiez également les disques de Moistboyz et de Chris Harford, qui sont vraiment des projets réservés aux fans de Ween les plus enragés.

Nous les considérons séparément de Ween. Ce sont tous les deux des disques incroyables. C'est la musique qui nous intéresse en premier. Et je ne crois pas qu'on soit les seuls à le penser, si tu te souviens que Mike D. des Beastie Boys avait signé Moistboyz sur son label Grand Royal. Et Chris Harford avait décroché un deal avec Elektra bien avant que Ween obtienne le sien. Commercialement, rien ne me fait peur si je crois au projet. Nous sommes très fiers de publier des disques qu'on adore.

Penses-tu qu'il y aura un volume 2 à Shinola ?

Je pense que oui, mais je serai incapable de dire quand.

5 novembre 2007

L'Ami Particulier

pacomeUn des thèmes principaux du groupe Ween est la relation complexe entre amitié et fraternité. Les deux leaders du groupe, Gene et Dean Ween – en réalité Aaron Freeman et Mickey Melchiondo – sont des faux frères, comme les Ramones. Ils sont frères en Boognish. Se faire frère est une manière de sauter par-dessus le problème de l’amitié, ou de l’amitié comme problème. C’est l’amitié qui a signé, en amont, la fin des Beatles, celle du Grand Jeu ou du premier surréalisme : Lennon et McCartney, Gilbert-Lecomte et Daumal, Breton et Aragon étaient amis, et la fin d’une amitié est toujours un événement indépassable (les Ramones sont d’ailleurs nés du pseudonyme de Paul McCartney à Hambourg, Paul Ramon, comme s’ils déployaient une alternate timeline où les Beatles ne se sépareraient pas).

Le problème de l’amitié comme passion amoureuse et identité destructible, on l’entend dans la chanson « Falling Out », une chanson de White Pepper (2000) qui, dans ce contexte particulier, ressemble à la réponse qu’aurait pu faire McCartney au Lennon de « How Do You Sleep ? » : « I recall a time when we were lovers / Before you, I hadn't any others / When the bad times came along / I turned and you had gone / From the start, I loved you, I was wrong / Falling out, it's the end / May as well have never been / The cards are up, the chips are all cashed in / You won't see me again / Don't consider me your friend / Falling out - look away - it's the end » (« Je me souviens d’un temps où nous étions amants / Avant toi, je n’ai pas eu d’autres / Quand les mauvais jours arrivèrent / Je me suis tourné vers toi mais tu étais parti / Depuis le début, je t’aimais et j’avais tort / C’est la brouille / C’est la fin / Il aurait bien pu ne rien se passer / Les dés sont jetés, les jeux sont faits / Tu ne me reverras plus / Ne me considère plus comme ton ami / C’est la brouille – regarde ailleurs – c’est la fin. »)

Une chanson récente, « Friends » (2007), revient ironiquement sur cette question : « Friends in life are special / Do you want me as your special friend ? » (« Les amis dans la vie sont particuliers / Me veux-tu comme ami particulier ? »)
Michel Foucault disait que le moment où on avait commencé à se poser la question de ce que les hommes faisaient ensemble (quand la société et la famille ne les regardaient pas), n’était pas seulement la date de naissance de la discrimination homosexuelle, mais également le commencement d’un discrédit sur l’amitié. Ween reprend à son compte ce discrédit, et ne donne comme alternative que : la fraternité ou le sexe. Tout ami devient un frère, mais tout ce qui n’est plus un frère devient un « ami spécial », ce qui rend la relation objectivement douteuse. L’ami ou l’amie est celui ou celle avec qui on veut baiser. Ce n’est pas loin du constat de Picasso (qui n’était pas spécialement homosexuel), qui disait : « Je n’ai pas d’amis, je n’ai que des amants. »

Frank Zappa, avec « Freak Out ! » (et l’ensemble de sa discographie) avait inventé la contre-amitié, une salle d’attente où l’auditeur devait mériter de devenir l’égal du musicien, à travers une suite d’épreuves, le désocialisant, le dé-déterminant et ouvrant au maximum ses capacités d’écoute face à l’inconnu ou l’inouï (c’est surtout audible sur la chanson « You’re Probably Wondering Why I’m Here », gigantesque gifle au goût public). Ween invente la post-amitié, où la distance et la froideur métaphysique sont de mise entre la musique et celui ou celle à qui elle s’adresse.
L’amitié est la naissance de toute interrogation philosophique, puisque le philosophe est d’abord l’ami de la sagesse, celui qui aime la sagesse (mais qui n’est pas sage). La post-amitié nécessite donc une approche post-philosophique. Si l’ami de la sagesse se transforme en celui qui veut baiser la sagesse, alors le post-ami est celui qui a accepté une distance, une froideur radicale vis-à-vis de toutes les notions de la vie émotionnelle. C’est celui qui n’en veut plus, de cette satanée sagesse, parce qu’il en sait trop sur elle.

C’est pourquoi le post-ami n’éduque plus, n’instruit personne, mais passe et fait passer des tests. C’est pourquoi il devient un « autre » de la civilisation, et se place à l’écart du monde, des hommes et de Dieu. Les Ween ressemblent à la forme que prennent les Autres (ou les « Hostiles ») dans la troisième saison de « Lost » (sans compter le fait que Gene Ween ressemble concrètement à leur leader, Benjamin Linus). Ils font peur mais ils ne font pas vraiment mal : ils touchent moins au corps de leur suppôts qu’à leur psyché. Ils répondent à un projet non-civilisationnel aux bases inconnues, sous l’autorité d’un être spectral, mystérieux (Jacob / le Boognish), à partir duquel ils séparent les humains entre « bons » et « mauvais ». Les « Mauvais » sont ceux qui sont, dixit Mikhael, « flawed, angry, weak and afraid » (défectueux, colériques, faibles et peureux). Ils masquent artificiellement toutes les inconsistances de leur identité et ils affirment un héroïsme que dément chacun de leurs actes.

Dans le cadre de Ween, les « Mauvais » seraient ceux qui ont pensé qu’il existait, sur la Terre, quelque chose comme une mauvaise musique. Ceux qui ont décidé, en amont, d’une bonne ou d’une mauvaise musique. Ceux qui ne sont pas capables d’écouter autre chose que ce qu’ils croient aimer. Les Ween font de la musique pour tout le monde : « democrats » et « republicans », noirs, blancs, beiges, rouges, jaunes. Et ils leur feront aimer toutes les musiques qu’ils ne sont pas censés aimer : de la disco pour les punks, du gagaku pour les cowboys, du blues pour les druzes, de la salsa pour les sumos. Ne pas aimer un morceau de Ween est une faute : à partir de celle-ci, on s’exclut – de soi-même – de la grande et complexe humanité, de l’arc-en-ciel humain (ou homo !) chanté sur le « Chief Aid » de « South Park » : « In & out changin, every day and night / From the golden shores of Kansas, to the middle of Japan / Reach inside your soul and learn your fellow / There are many colors in the homo rainbow / Don't be afraid to let your colors shine » (« Changeant du dedans comme du dehors, chaque jour et chaque nuit / Des rives dorées du Kansans au cœur du Japon / Plonge dans ton âme et apprend à reconnaître ton confrère / Il y a beaucoup de couleurs dans le homo rainbow / N’aie pas peur de laisser tes couleurs briller. »)

En Boognish, tous les hommes sont frères.

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